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Quelles démarches participatives au sein des institutions ?



Matthias Lecoq, enseignant et chercheur en urbanisme au sein de l’université de Genève, s’intéresse tout particulièrement aux processus participatifs dans la ville. Ayant travaillé plus de quatre ans au sein de l’Office de l’urbanisme de Genève, il a pu acquérir une double compréhension de l’évolution de la ville, tant du côté de l’administration que de la société civile.


Afin d’étayer son propos, il fait usage de vidéos, à la fois issues de ses propres archives et d’extraits de films de Spike Lee ou encore Paul Auster. Les premières vidéos projetées, notamment l’introduction de « Do the right thing », permettent d’attester de l’intensité des relations humaines par la mise en scène de la vie quotidienne, questionnant ainsi le travail de l’urbanité.



En effet, Lecoq part d’un constat assez clair : il existe une multitude de villes, mais il existe également une multitude de façons de vivre la ville. Il questionne alors notre rapport à l’altérité au sein de l’espace urbain, car « c’est dans la ville qu’on trouve le silence ». Quelle lecture fait-on alors des espaces proposés à la citoyenneté ?


Il s’agit alors de venir nourrir autrement la vie collective. En se basant sur le travail d’Henri Lefebvre, et de sa théorie critique de l’urbanisme des années 70, qualifiant la tentative d’amener la discipline au rang de « science de la vie sociale » « d’échec total », Lecoq embraye sur la crise du logement, et donc de la ville causée par l’effondrement des subprimes en 2008. Née en partie de la marchandisation de la ville, la récession interroge sur le dessaisissement de l’espace urbain par sa population. Il paraît alors faire sens de mêler institutions et processus participatifs, contribuant à remodeler la ville de demain.


Subsiste cependant un problème de fond de l’ingénierie de la concertation : les chargés de projets urbains responsables de la bonne marche des processus participatifs sont les dépositaires d’une ingénierie particulière. On leur demande en effet de maîtriser l’intégralité d’un projet, et d’insérer un processus politique en son sein, à savoir la participation. Or, un processus politique est par définition pas maîtrisable, puisqu’il est issu de la discussion de plusieurs personnes ou groupes aux intérêts divergents. On demande donc à des populations de participer à un objet fixé au préalable. Il semble alors légitime de se demander si l’aspect politique de la concertation n’a pas été dépossédé de son essence.


En outre, on assiste également à une mise en tension entre celle.eux qui font la ville et celle.eux qui la vivent. Le processus de planification et d’aménagement est accaparé par des personnes qui se professionnalisent, créant alors le risque d’une forme de technocratisation de la ville. Se pose alors la question des circonstances de l’aménagement et de la planification, à savoir s’ils ne constituent pas l’affirmation de la prédominance d’un groupe sur la ville, incarné notamment par l’élévation de grandes tours de béton et l’abattement d’arbres au sein de l’espace public.


La participation est donc, on l’a vu, par définition caractérisée par l’imprévu. Il existe donc selon Lecoq une dichotomie entre la rue et l’aménagement et le plan. De plus, le plan est censé aboutir à une réalisation à un point donné, contrairement à la participation, qui s’incarne au contraire dans la saisonnalité, à l’image du festival Explore, où les populations sont amenées à faire connaissance, et à se reconnaître au fur et à mesure.


Pour conclure, la ville est un acte politique en soi, où s’incarne la mise en tension entre un processus huilé (l’administration), et la politique. Lecoq évoque Hannah Arendt et son approche de la mise en œuvre : quel rôle doit-on donner au citoyen ? Comment faire pour le mettre à l’œuvre, tout en augmentant sa capacité à s’exprimer au-delà du savoir d’usage électoral conventionnel ?


Article issu de la discussion urbanology du 09.03.2023

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